


On doit au cinéaste indépendant américain Richard Linklater la tendre trilogie des Before (Before Sunrise en 1995, Before Sunset en 2004 et Before Midnight en 2013), où il raconte avec finesse les flammes, les errances et les retrouvailles d’un couple atypique incarné par Ethan Hawke et Julie Delpy.
Spécialiste des récits sur le passage à l’âge adulte (Boyhood, Génération rebelle), le réalisateur texan s’attaque ici au tournage emblématique d’À bout de souffle de Jean-Luc Godard. Pour ce faire, il réunit un casting majoritairement composé de débutants, à l’exception de l’excellente Zoë Deutch, qui se glisse avec un naturel désarmant dans la peau de Jean Seberg.
Vingt ans après avoir arpenté les rues parisiennes dans Before Sunset, Linklater retrouve la capitale française pour recréer le tournage d’À bout de souffle tel qu’il prit vie en 1959. Dès les premières images, la scène de la promenade sur les Champs-Élysées happe le spectateur. Avec Nouvelle Vague, l’ambition est claire : plonger le public dans le Paris de Godard, en 1959. On ne se contente pas d’observer Godard et sa bande d’il y a soixante-cinq ans ; on est transporté à leurs côtés. C’est là toute la magie de ce film.
Tout, dans Nouvelle Vague, est pensé pour donner l’impression d’être au plus près de Godard, Truffaut, Chabrol ou encore Belmondo. Pour ce projet audacieux, un faux making-of du chef-d’œuvre de Godard, il était essentiel de miser sur des acteurs peu connus, afin de capturer l’essence terriblement française de cette époque. Pari risqué, mais brillamment relevé, voire « euphorisant ». Dans un Quartier latin des années 1960, baigné de nostalgie, d’insouciance et d’élan créatif, Linklater raconte avec légèreté la genèse d’un chef-d’œuvre. Cet Américain à Paris parvient à saisir l’esprit d’une époque sans jamais sombrer dans les clichés. Le choix du noir et blanc, sans doute destiné à faire ressortir les lunettes emblématiques de Godard ou les marinières de Jean Seberg, ajoute une touche de charme intemporel.


Nouvelle Vague met en scène une petite bande d’amoureux du cinéma, de flippers et de discussions enflammées, qui signent des articles dans l’espoir de passer un jour derrière la caméra. Il fallait probablement le regard extérieur d’un cinéaste étranger pour offrir une perspective à la fois précise, inspirée et tendre sur cette période fondatrice. L’astuce de Linklater réside aussi dans le choix de comédiens qui évoquent subtilement leurs modèles, renforcé par l’esthétique du noir et blanc. Dès les premières minutes, la réussite est évidente : Nouvelle Vague est une ode vibrante et sincère à la Nouvelle Vague et à l’amour du cinéma.