


Loveable dresse un portrait poignant d’une femme en plein épuisement. Au-delà de la question de la charge mentale féminine ou de la place de chacun dans un couple où l’un des deux travaille et semble disposer de moments à lui hors du foyer, le film explore avant tout l’accumulation de frustrations et la colère qui en découle. Avec intelligence, le scénario de Lilja Ingolfsdottir dissèque ces émotions brutes.
Maria, 40 ans, jongle entre ses quatre enfants et une carrière exigeante, tandis que son second mari, Sigmund, s’absente de plus en plus pour son travail. Un soir, une dispute violente éclate, et Sigmund annonce qu’il veut divorcer. Épuisée, Maria perd patience et laisse éclater sa colère. À qui en veut-elle vraiment ?
La réalisatrice ne quitte pas son héroïne d’une semelle, même lorsque celle-ci se révèle difficile à aimer – un défi que l’actrice Helga Guren relève avec brio. À travers des séances de thérapie et des règlements de comptes familiaux, le film pousse Maria à affronter une question angoissante, jusqu’à l’inconfort et l’impudeur.

Au-delà de la maternité, Loveable interroge les rôles assignés au sein de la famille et la difficulté de s’en affranchir. Maria est prisonnière de cases prédéfinies : mère, épouse, fille. Le film explore ces assignations et montre le cheminement nécessaire pour s’en libérer. La relation avec sa propre mère met en lumière des schémas intergénérationnels de comportement et d’incommunicabilité. En se confrontant à ces modèles, Maria cherche à façonner une identité propre, libérée des attentes familiales et sociétales. Qu’il s’agisse d’une pile de linge à plier ou de divergences plus profondes, tout devient prétexte à l’embrasement.
Loveable signifie Adorable et dépeint l’érosion accélérée d’un couple hétérosexuel plombé par les frustrations, les promesses non tenues et le poids du quotidien.
La réalisatrice Lilja Ingolfsdottir signe une œuvre implacable mais paradoxalement lumineuse, portée par des fulgurances d’écriture et de mise en scène. Son travail sur la temporalité frappe particulièrement : quoi de plus terrible que de réaliser que les raisons de la rupture étaient présentes dès le début ?